CRITIQUE// West Side Story, l’indéboulonnable

West Side Story au Théâtre du Châtelet
du 26 octobre 2012 au 1er janvier 2013
Mise en scène et chorégraphie : Joey Mc Kneely

 

Les places au Châtelet son chères, il est vrai, d’autant qu’il vaut mieux s’assurer d’être bien placé si l’on veut jouir pleinement de la représentation. Par ailleurs, les amateurs du film de Jerome Robbins et Robert Wise (1961, avec Nathalie Wood et Richard Beymer) pourront regretter qu’il n’y ait pas tant d’innovation par rapport aux chorégraphies et aux péripéties qu’ils connaissent déjà. Néanmoins, les performances des interprètes qui se dérouleront sous leurs yeux rachèteront sans doute le manque de surprise. West Side Story est une formule qui fait chaque fois recette, et le succès du film n’entame en rien celui des représentations, multipliées depuis la création du spectacle.

L’interprétation des chansons est de qualité et – étonnement ! – certaines d’entre elles ne figurent pas dans le film. Les duos de Maria et Tony sont convaincants, mais ce sont évidemment les morceaux collectifs qui réjouissent le plus : outre les grands favoris applaudis avec raison (l’ouverture par les Jets, le bal, America), on retiendra un savoureux Gee Officer Krupke, dont les pantomimes comiques révèlent toute la palette de talents de la troupe. Même connues, les chorégraphies restent impressionnantes et laissent rarement indifférent. C’est sans doute une supériorité du spectacle sur le film : l’utilisation judicieuse de l’espace scénique et le déploiement visible des corps sur un cadre restreint donnent une nouvelle valeur aux danses exécutées. La course-poursuite du début entre les Jets et les Sharks donne ainsi lieu à des entrées et des sorties et des répétitions entraînantes, voire à des rebondissements humoristiques. De quoi démontrer qu’en 2012, la comédie musicale de Jerome Robbins et Leonard Bernstein a encore de beaux jours devant elle.

Bien entendu, West Side Story est un spectacle engageant, dont la qualité est aussi indémodable qu’indéniable. Il est seulement dommage qu’il se termine sur une scène sombre et surtout parlé e: elle répond certes aux objectifs des auteurs, mais fait se dissoudre les brillantes exécutions dans un malheur réel jusque-là évoqué en filigrane. Heureusement, cette déception n’enlève finalement rien au plaisir pris à revoir ce classique.

F.A.